Ce journal veut être un instrument pour analyser mes ressentis, mes rages, mes colères, mes tristesses aussi devant cette maladie qui instrumentalise celui qui en est porteur.
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mercredi 5 septembre 2007
Le prix de la guérison.
Pour soigner une maladie à potentiel létal, le corps médical utilise des traitements qui ont coût financier important, mais qui ont ausi un coût somatique et psychique pour le patient.
Ce que je vis en ce moment dans mon corps, qui est assailli par une fatigue importante, me semble être de cet ordre là. Ce n'est pas une critique, c'est un fait. Et de ce fait là, on ne parle pas ou peu.Peut-être a-t-on peur d'induire des effets secondaires, mais il me semblerait important d'en parler. C'est d'ailleurs ce "parler vrai" que j'ai essayé de pratiquer durant ma vie professionnelle en pédiatrie chirurgicale.
La guérison n'est pas de l'ordre du miracle, elle se paye dans le corps et dans le psychisme.
Même si je sais que cette fatigue est temporaire, quand elle se manifeste, c'est comme si je me sentais en train de m'effondrer. Je dois m'allonger presque immédiatement. Mon coeur se met un peu de la partie, il y parfois une sensation désagréable soit de chaleur, soit de froid, et la nausée qui se manifeste parfois à minima, augmente encore la sensation de vulnérabilité. Outre le fait que cette image de moi est pénible à assumer, il y a aussi réactivation de ces angoisses archaïques du bébé bien décrites par Winnicott: peur de tomber, peur de se morceler.
Ce n'est peut-être pas étonnant que les images que j'utilise tournent autant autour de l'eau... Régression mais aussi restauration car malgré tout, l'adulte reste (ou essaye de rester) aux commandes.
Autrefois quand l'hôpital d'enfants où je travaillais, recevait des enfants qui venaient d'Algérie et qui étaient porteurs de malformations graves, ils disaient tous y compris leurs parents, qu'ils venaient en France "pour être guéris". Ils acceptaient de quitter leur pays, leur langue, souvent leur famille, pour une sorte de miracle. Du coût à payer pour que la guérison ou la rémission soit là, il n'en n'était pas question..
J'ai vu il y a peu de temps un reportage sur le service orthopédique d'un grand hôpital parisien pour enfants. Il s'agissait d'un petit garçon africain, porteur d'une grave malformation des jambes. On lui a juste dit: "tu vas avoir un appareil pour que ta jambe soit redressée et après on s'occupera de l'autre. Ton papi avec un tournevis il permettra à ta jambe de se redresser petit à petit". J'espérais qu'on lui aurait montré les anneaux, les vis, les tiges avant l'intervention... Apparemment non, et la réaction de renfermement sur lui de ce petit garçon au réveil montrait bien l'intensité du traumatisme. Bien entendu un enfant a souvent en lui un potentiel de vie qui lui permet comme on dit de rebondir, mais je pense que des choses sont à dire, à montrer.
Et cela reste vrai pour les rayons. Les rayons tuent les noyaux des cellules cancéreuses et des cellules saines. Et il y a des réactions de l'organisme qui sont des réactions individuelles, selon l'histoire de chacun, mais qui devraient être évoquées.
Ma numération sanguine(NFS) pratiquée à ma demand eà la fin des séances de rayons, n'est pas "mauvaise", mais elle accuse des variations par rapport à celle effectuée 6 semaines après l'intervention chirurgicale. L'hémoglobine est en légère baisse, ainsi que les leucocytes, et les plaquettes. C'est loin d'être dramatique, cela n'a rien à voir avec les aplasies dues au chimiothérapies, mais je sais que chez moi, quand le taux de fer est un peu bas, je ressens une fatigue. Pourquoi a-t-il fallu que je demande moi-même une NFS? C'est si important de comprendre au moins un peu à quoi est due cette fatigue qui demeure si présente et si collante...
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