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mardi 29 avril 2008

Silencieuse



                               Premières tulipes. J'attends maintenant des iris et j'ai ajouté des myosotis.




                                                        Prieuré Saint Benoît. Reflets dans l'eau. 

Il y a bien longtemps que ce blog n'a pas servi. 

Par certains côtés en ce qui concerne le cancer, il ne se passe rien, du moins je l'espère.Je prends mes médicaments. J'ai pris les rendez vous nécessaires pour les examens précédant ma consultation avec l'oncologue (mois de juin). 

Suite à une visite chez mon phlébologue, je suis décidée à consulter le chirurgien qui m'a opérée l'an passé, pour parler avec lui des effets de la chirurgie (d'après le phlébo, 2 ans pour que tout soit cicatrisé) et surtout des rayons, (10 ans pour ce même phlébo) parce que d'une certaine manière ce sein est un peu "mort".

Il ne se laisse pas oublier, certains mouvements sont douloureux, les sensations au niveau de la peau sont bizarre "peau carton" et la différence de volume et de texture me dérange. Or j'ai besoin de savoir quels sont les effets de ces traitements. Je sais que tout a été bien fait, que j'ai été bien soignée, que le protocole a été appliqué, mais  pour me sentir reconnue, j'ai besoin que l'on m'explique ce qui se passe dans un corps quand il a été irradié. Pas juste dire merci vous m'avez bien soignée, mais dire, voilà ce que je ressens, comment est-ce-que cela s'explique (ou d'ailleurs ne s'explique pas). Bref des mots pour parler de ce corps qui est le mien et que j'habiterai jusqu'à ma mort.

Je sais que j'ai beaucoup de chance. Je vis et que je vis bien. Je devrais accepter, mais finalement je me rends compte que cette maladie on ne l'accepte pas. Et moi, j'ai besoin de mots pour dire.  Car cette maladie m'a profondément transformée moi et mon corps. 

Un jour après l'autre. Chaque réveil est une petite joie, surtout quand on est deux. 

Profiter de chaque moment, profiter de ces jours de soleil où je peux jardiner ou gratouiller la terre pour en extirper les mauvaises herbes qui reviennent dès qu'il pleut un peu

Profiter de l'odeur de la brioche toastée le matin, de celle du café, des odeurs de cette maison que j'aime, de la lumière du soleil, de la nouvelle table en bois d'acacia, des serviettes neuves, des livres, profiter des choses nouvelles qui remplacent les trop vieilles, bref profiter des "petits bonheurs".

Je n'arrive plus du tout à faire de projets à long terme. Ce n'est pas que je sois devenue incapable de me "projeter" mais faire des projets au delà d'une quinzaine est difficile. Bien entendu je parle des prochaines vacances à Oléron ou aux Arcs, mais il y a comme une petite restriction... Et si... 

Je me suis aussi décidée à arrêter les anti-dépresseurs depuis maintenant presque un mois. Cet arrêt ne m'a pas été évident.. Arrêter ce genre de médicament n'est jamais facile. J'ai l'impression de vivre à nouveau avec une certaine sensation de fatigue (pas celle des rayons), mais fatigue quand même, avec une impression d'épuisement dès que j'en fais un peu trop.

J'ai retrouvé cette cette hyper sensibilité (larmes qui montent trop facilement) qui m'a toujours caractérisée (et dont mon père se moquait). Mais elle fait partie de ce que je suis, alors si je peux m'assumer avec, pourquoi pas. C'est un peu comme si cette molécule m'avait servi de protection, de bouclier. Maintenant la protection c'est en moi que je peux la trouver. Et si l'émotivité se manifeste, ce n'est pas bien grave. 

J'avais commencé à prendre ce médicament à la mort de ma chatte, juste avant le début des rayons. J'ai essayé de diminuer il y a déjà quelques temps, mais immédiatement sensation de fatigue était réapparue,  alors j'avais repris la dose normale. Maintenant, il me semble que c'est le bon moment et que j'aime faire confiance à ce que je ressens.  

Le printemps tarde et même si le bouleau pleureur de mon jardin a sorti ses premières feuilles un peu en avance, et qu'il est d'un beau vert profond.

J'ai soif de soleil à défaut de chaleur.


Il y a en moi en ce moment une image qui m'émeut (cela c'est finalement le côté positif de la sensibilité): celle d'une source qui chemine depuis très longtemps dans la terre brune et sans lumière, sans que personne ne puisse l'imaginer (sauf peut-être un sourcier) et qui un jour se met à poindre, merveille de la première goutte d'eau, qui sera suivie très lentement d'autres, jusqu'à faire un petit filet où les oiseaux pourront boire ou même s'ébrouer. Et la terre donne naissance à l'eau et à la vie. Mais il faut de la patience et pouvoir s'extasier devant ce petit miracle de la première goutte qui sourd de la terre.