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lundi 27 août 2007

Lumière rouge.

Quand l'appareil se met en route, deux lampes rouges s'allument puis j'entends un léger bourdonnement.Les rayons atteignent alors le "lit tumoral". C'est très court de l'ordre de la minute. Le bruit ténu cesse, les lampes rouges s'éteignent, la porte se rouvre, j'attends que la table soit remise en place et je descends cette fois sans escabeau. C'est cette lumière rouge qui signe en quelque sorte, pour moi, le moment où je dois me concentrer sur des images.

J'avais parlé de ma difficulté à trouver une représentation visuelle satisfaisante. En fait je me suis rendue compte qu'il y avait aussi une difficulté linguistique. Un nodule cancéreux n'est pas une tumeur cancéreuse. Or là on emploie l'adjectif tumoral, qui peut s'entendre comme " tue (le) moral" ce qui renvoie bien à un des effets possible de cette maladie sur le psychisme et surtout le mot "tumeur" qui renvoie à quelque chose de très mortifère: "tu meurs". Quand je travaillais en chirurgie pédiatrique, le terme de tumeur était banni comme le mot cancer. On parlait de carcinome, d'ostéosarcome, comme si le nom scientifique permettait d'exorciser la peur liée à la représentation du cancer.

Une fois cette difficulté de vocabulaire repérée, j'ai pu me représenter le lit tumoral comme le lit d'une rivière au fond de laquelle vivent de nombreuses algues, qui s'agitent sous l'effet du courant et qui peuvent absorber le mauvais et le métaboliser comme les feuilles de mon arbre. Il y a donc de l'eau qui court et qui peut aussi non pas dévier les rayons par réfraction, mais faire un matelas. Sur les rives, il y a des arbustes, des fleurs, de la mousse , une représentation d'un univers doux, moëlleux, absorbant.

Vendredi, après cette attente qui a été si difficile pour moi, j'ai lu un article sur Matthieu Ricard, dans Courrier International. Il parle de la représentation que l'on peut avoir du bonheur. J'ai lu avec intérêt cet article. Samedi matin, je me suis revue, adolescente, assise sur un appui de fenêtre. En dessous de moi, il y avait un toit de tuiles provençales, lavées par les pluies, blanchies par le soleil, et au loin, il y avait le miroitement de la mer, le bleu du ciel, le soleil.Une sorte de moment hors du temps, un moment de bonheur.

Et d'un coup, il m'est venu la certitude qu'en moi, en dessous, au profond de moi, il existait un lac miroitant sous les rayons du soleil, que ce lieu je pouvais y "descendre" en rentrant en moi même. Et le désespoir que j'avais vécu vendredi, cette espèce de tempête qui m'a fait si mal, c'était comme des vagues qui s'agitent sous l'effet de la tempête, mais que je n'étais pas obligée de les affronter, que ça ne me détruisait pas, car en plongeant en dessous, le calme était là.

Peut-être devrais-je descendre plus profond pour trouver la source, mais le soleil qui fait étinceler la surface du lac est là en moi et pour aujourd'hui, je suis dans le ravissement d'avoir ce bonheur à portée de main, dans mon coeur si je puis dire, ou encore dans mon sein.

Je dois dire que depuis que cette représentation m'a été donnée, car pour moi, c'est un véritable don, la fatigue est moins présente et mis à part l'état nauséeux qui signe la fatigue, je vais beaucoup mieux.

Et pourtant, même s'il ne reste que 3 séances, je ne peux pas imaginer véritablement que ça va s'arrêter et que nous pourrons partir contempler la mer et le miroitement des vagues sous le soleil.

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