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vendredi 30 décembre 2011

Boule de graisse fin


Comme prévu l'intervention a eu lieu mercredi dernier. La seule ombre a été l'attente... C'était prévu pour 13h, ce fut à 14h45. Heureusement je n'étais pas seule. Mais le simple fait d'être dans ce boxe réveille en moi des peurs de l'enfance: et si on m'oubliait...

Personnel gentil. Découverte des culottes en tissu non tissé. Le reste, blouse, charlotte chaussons je connaissais.

Le chirurgien m'avait prévenue que la piqûre serait un peu douloureuse, ce fut le cas, mais très bref. Ensuite plus rien, mais je sentais des gestes (mais sans paroles, il est difficile de savoir ce qui se passe). Impression quand même de gestes d'arrachement, mais c'est juste une impression. Ce serait tellement plus simple s'il y avait des mots, j'ouvre, je décolle le lipome, je recouds... Je sais que je peux toujours rêver.

L'infirmière du bloc (très sympathique cette petite dame qui fait ce métier depuis 1974) m'a montré le lipome et là je dois dire que ça a été une bonne surprise. Je m'attendais à une espèce d'amas de graisse jaunâtre, comme de la graisse de canard, mais ce n'était pas du tout ça; Certes c'est un peu jaune, mais avec le sang cela fait plutôt rose et j'ai eu l'impression de voir un beau poisson en train de flotter dans le bocal. Ce n'est pas du tout une boule, mais une forme ovoïde, assez symétrique, donc d'une certaine manière je ne suis pas trop mécontente d'avoir fabriqué ce truc là (dont je me serais quand même bien passée). Bref une bonne surprise. Retour ensuite à la maison et là...

Là une fatigue énorme qui m'est tombée dessus. Cela m'a étonnée car je ne m'y attendais pas du tout. Choc opératoire? Peut-être. Après tout il a quand même fallu ouvrir pour chercher "le poisson" et je dois dire le fait d'avoir cette bosse dans le dos (cet oeuf si on peut dire) , m'a fait penser à la phrase "faire un bébé dans le dos" et là vu la forme c'est un peu comme une césarienne: quelque chose est sorti de moi. Ce que ce quelque chose représente cela je ne le sais pas. J'ai toujours pensé que je ne "portais pas" les personnes que je reçois sur mon dos, peut être que je me trompe. Peut-être y a t il quelque chose à reprendre dans ma manière d'être. A suivre.

Donner un sens à ce lipome n'est pas aisé. Peut être n'en a t il aucun, mais je pense que le lieu où se met cet amas n'est pas neutre et que ça finira bien par prendre sens pour moi.

Quant à la douleur, elle s'est manifestée vers minuit. Je pense qu'il a dû mettre une bonne dose de xylocaïne pour que l'insensibilisation dure aussi longtemps. Elle perdure encore aujourd'hui, mais c'est très supportable. Et je prends ce qu'il faut.

Pour la fatigue, c'est mieux aussi. Simplement il y a une partie de moi qui accepte mal cette réaction somatique à une intervention que je désirais et qui est quand même extrêmement brève.

Il me faut juste espérer que cette "fabrication" de cellules des graisse en restera là, du moins pour un bon bout de temps.




mardi 6 décembre 2011

Boule de graisse, suite.

Je ne sais pas si elle grossit ou pas cette boule, mais vraiment je ne l'aime pas.Il est certain que a minima elle me renvoie à ces bosses liées aux scolioses des enfants opérés à Saint Vincent de Paul, à ces déformations, à ces handicaps.

Je suis donc contente de savoir que nous n'avons plus que 3 semaines de cohabitation, elle et moi. Le chirurgien que j'ai rencontré hier va l'enlever le 28 décembre en principe dans la matinée. Il fera une anesthésie locale (xylocaïne) une incision de 3 à 4 cms qu'il refermera par une couture surjet (ça j'aime bien, car il n'y aura pas de traces) avec du fil qui part tout seul. Une compresse à enlever dès le lendemain. Tout cela me va fort bien.

j'ai eu un peu envie de rire quand il m'a proposé une anesthésie générale juste pour ne pas voir le "bloc"...  Moi, j'aime bien voir, je suis finalement quelqu'un de très curieux et comme il fera son travail "dans mon dos", je ne verrai hélas rien.

Outre l'atteinte narcissique liée à cet oeuf dans mon dos, il y a le rappel du mélanome de la femme de mon père, qui faisait des boules un peu partout et aussi de la maladie de Recklinhauser, la neuro fibromatose qui est une vraie saleté. Le fait d'avoir vu ces maladies ne favorise peut être pas la "tranquillité" de l'esprit, mais je dois faire avec mon histoire. Je pense que malgré tout je ne serais totalement en paix avec ce truc que lorsque j'aurais reçu les résultats de l'histologie.

Et puis, mais là je n'ai pas encore d'idées, ce lipome qu'est ce qu'il veut me dire?

dimanche 13 novembre 2011

"Boule de graisse"

boule de graisse....

Acte 1.

Il y a un roman de Maupassant qui s'appelle "boule de suif". Moi j'ai une grosse boule de graisse sur l'omoplate et bien entendu la question que je me pose est: comment ai je réussi à me fabriquer une nouvelle tumeur? je sais qu'elle est bénigne puisque le nom savant est "lipome", puisque comme le cancer, cela ne vient pas de l'extérieur: on n'attrape pas ça par contagion, mais bien de l'intérieur.

Mardi je saurais ce qu'il en est (il faut dire que lorsque je travaillais en milieu hospitalier j'ai vu des "boules" comme ça qui étaient des saletés), donc j'ai besoin de savoir si ce n'est que ça. J'espère aussi qu'on me proposera de l'enlever, parce que ce truc me fait mal : je pense que si je ne l'ai pas vu plus tôt c'est que je pensais que la douleur dans le dos, c'était musculaire comme souvent, et surtout que mon narcissisme, mon image de moi en prend un coup.

D'une part j'ai une bosse dans le dos et la bosse cela renvoie à bossu etc etc et surtout c'est de la graisse et quelque part il y a quelque chose de sale dans ce mot.

Donc vivement que ça parte.

Acte 2.

L'échographie dit que c'est un lipome de 6 cms de long, de forme discoïde et de 7mm d'épaisseur dans la partie centrale. J'ai pris rendez vous en chirurgie pour le 5 décembre et ce sera l'acte 3.

vendredi 30 septembre 2011

Quatre ans après

A peu de choses près, il y a 4 ans, au début du mois de septembre, à la fin de la radiothérapie, nous avions passé une semaine en Bretagne et avions fait la côte jusqu'à Fort Lalatte.

Nous avons repris le sentier côtier à la fin du mois dernier (Août) et avons redécouvert la mer, les senteurs, les bruits, les fleurs, les couleurs.

Ce petit séjour a été très bénéfique comme il l'avait été il y a 4 ans. Puis il y a eu la prise de sang, les examens radiologiques et échographiques.


Une fois de plus j'ai détesté la mammographie qui est vraiment très très douloureuse et l'attente en cabine. Est ce que cette attente dans un lieu clos, sans fenêtres où l'on entend des bruits de voix et autres, provoque chez moi une sorte de peur du style: et si on m'oubliait là-dedans? Je ne sais pas. Mais vraiment je n'aime pas ce temps qui s'éternise sans rien pouvoir faire. Ceci dit, j'ai eu dans la foulée l'échographie des seins et les échographies pelviennes et abdominales, et cela j'ai apprécié. Je me demande toujours comment font les personnes qui ont du mal à respirer, car il faut retenir sa respiration bien des fois durant ces examens.

La visite chez l'oncologue (prévue de longue date) était pour mercredi de cette dernière semaine de septembre. Curieusement, comme l'an passé, nous avons eu droit à un énorme ralentissement (vive les travaux) et nous sommes arrivés en retard. A croire que je n'avais pas du tout envie d'y aller. Le médecin lui-même étant en retard, je n'ai pratiquement pas attendu et à ma grande surprise, d'une part il ne m'a appelée "jeune fille" ce que je n'aime pas du tout, et d'autre part il a remarqué que mes cheveux étaient un peu différents ce que j'ai apprécié.

Il a aussi pu me dire que la douleur dans le sein irradié, personne ne pouvait savoir si elle serait à vie, mais ça au moins c'est reconnaître que la douleur existe et ça me va.

Donc en soi visite positive. Encore une dans un an et ensuite normalement ma gynéco pourra prendre le relais.

Maintenant, il me faut dire que être confronté dans sa famille très proche à quelqu'un qui est soigné pour un cancer du sein, c'est loin d'être facile. S'il y a bien quelque chose que l'on aimerait éviter à ses proches c'est de passer par ce parcours qui fait passer du monde des bien portants au monde des malades et qui surtout parce que c'est une maladie à potentiel létal, change complètement le rapport au temps, le rapport aux autres, le rapport à la vie.

Si pour moi, ce cancer pris à temps, petit en taille n'a jamais été considéré comme pouvant provoquer "ma" mort, il m'a profondément changée. Chaque jour est un jour donné et surtout faire des projets à long terme n'est plus possible.

Si la fatigue, la mauvaise fatigue a considérablement diminué, elle est toujours là ponctuellement. Alors se dire que quelqu'un pour qui on a beaucoup d'affection va devoir vivre un traitement beaucoup plus invasif que celui que j'ai connu, ne rien pouvoir faire pour éviter cela, parce que cette maladie, elle a son protocole de soins, cela est difficile et réactive aussi un vécu que j'aimerai pouvoir mettre aux oubliettes, même s'il le refuse obstinément.

On dit que le cancer est un comme un crabe, je dirai aujourd'hui que le cancer c'est quelque chose qui s'attache à vous, comme une arrapède sur son rocher, et qui est là à vie.Elle ne se nourrit pas de vous, mais elle s'attache...



lundi 20 juin 2011

Déjà quatre ans ou seulement quatre ans?



j'ai trouvé il y a 4 ans ce beau bouquet en revenant de l'hospitalisation pour l'exérèse du petit nodule cancéreux qui était venu se mettre dans mon sein. 




De ce bouquet il reste un unique bambou, qui a fait de superbes racines et qui par les pousses est pour moi un symbole de vie.


bambou
Ce billet anniversaire est aujourd'hui pour moi une sorte de moyen de faire le point 4 ans après, (dans un an il faudra refaire une demande pour le 100%) mais aussi de tenir compte du temps qui passe, car l'échéance des 70 ans est très différente de celle des 60. N'y a t-il pas un psaume qui dit: le temps de nos années, quelque 70 ans, 80 pour les plus robustes" Ps90, 10

Ceci pour dire que cela fait 4 ans que le nodule cancéreux a été enlevé et deux ans que le traitement "anti récidive" a été stoppé. Certes il m'est impossible de faire comme si ce cancer n'avait pas existé parce que le sein opéré et rayonné se fait sentir chaque fois que je me couche, que je m'appuie ou non sur lui. Si je m'appuie dessus cela fait réellement mal mais c'est une douleur brève, par contre dans d'autres positions c'est un  peu comme si quelque chose à l'intérieur le malaxait ce qui n'est pas vraiment douloureux,  mais très désagréable. Ceci dit il me semble que la douleur est beaucoup moins forte maintenant qu'elle ne l'a été alors peut-être qu'un jour lointain cela sera totalement atténué. C'est une question, le temps seul y répondra.
Si je me considère comme "guérie" de ce cancer, je ne peux pas faire comme si cela n'était pas arrivé, car tous les jours "il" reste présent. En fait quand je dis "guérie" c'est parler un peu vite, car la moindre douleur à un endroit inhabituel provoque la peur d'une métastase. Comme quoi ce n'est pas si simple. Il y a le rationnel et le reste.

Il reste aussi les bouffées de chaleur, qui même si elles sont devenues beaucoup plus rares perdurent. Je les attribue au traitement tamoxifène et à son arrêt. Les aurais-je eu de toutes les manières? Je ne sais. Même si parfois j'essaye de leur donner un sens de purification (mettre dehors le mauvais du dedans, comme la fatigue par exemple),  je trouve cela très pénible et usant. Mais là encore il y a un mieux, mais elles existent toujours et donc l'oubli est impossible car pour moi elles ne sont pas associées à la ménopause mais au cancer.

 Un des autres désagréments lié au cancer a été la fatigue. Aujourd'hui il m'est par contre difficile de savoir si la fatigue que je vis au quotidien est liée ou non à la maladie.

Curieusement il y a pour moi plusieurs types de fatigue. Il y en a une très spécifique pour moi qui est liée aux rayons et qui se traduisait par une sorte de mal de coeur, de besoin de tout laisser pour s'allonger, elle est devenue rarissime, mais elle existe toujours. Je l'appelle "la mauvaise fatigue" et en ce moment elle a tendance à se réactiver ce que je n'apprécie pas. Car il y a une petite partie de moi qui se dit et si cette fatigue était le signe de quelque chose qui va me tomber dessus.

Il y a la fatigue liée à un certain effort et celle la, même si elle m'ennuie un peu, je l'aime bien parce que j'en connais l'origine. Simplement elle arrive beaucoup plus vite que par le passé, et du coup elle me dit que l'âge est là, qu'il y a des choses qu'un jour je ne pourrais plus faire, qu'il faudra demander de l'aide et ça je n'aime pas. Elle est alors signe d'un deuil à faire. Mais heureusement en général je récupère vite et même si je ne reprends pas l'action entreprise, comme par exemple tailler les haies ou griffer la terre. Les efforts qui me demandent de mettre les bras en l'air, je les supporte de plus en plus mal, fini les plafonds et autres choses de ce style, et pourtant les araignées tissent leur toiles...

Par contre il y a une autre forme de fatigue qui se profile aujourd'hui, un peu sans raison et celle là je ne l'aime pas du tout. Il est difficile de la décrire, c'est une sorte d'état général et il faut que je me pousse un peu (au cul) pour faire ce que j'ai à faire. Je mettrais sur elle le mot de lassitude, plus envie de faire certaines choses, envie de m'occuper plus de moi, de passer plus de temps ) écouter de la musique et à lire (à condition de trouver un livre qui m'intéresse vraiment). C'est un peu comme si cette fatigue me disait que j'en ai trop fait, que je n'ai pas su me protéger, mais me protéger de quoi? Je dirai aujourd'hui parce que je réfléchis à la fois sur un sens possible mais aussi à une manière de trouver un moyen d'en faire une alliée et non pas une ennemie que je dois changer quelque chose dans ma manière d'être en relation avec les autres.

bouclier en améthyste
J'ai d'abord eu une image de miroir protecteur: l'angoisse de l'autre (ou ce qu'il porte en lui) au lieu de transiter par moi pour être métabolisé, doit en fait être directement réfléchi en dehors de moi, aller dans un ailleurs qui s'occupera justement de cette transformation. Ce serait une sorte de bouclier.

Puis une autre image est venue, c'est celle de la réfraction. Quand un rayon lumineux touche la surface de l'eau, une grande partie est réfléchie (ce qui renvoie à l'image précédente) et seule une partie est réfractée, je dirai passe par moi pour être ensuite transformée, mais au lieu de tout prendre de plein fouet, cela permet une diminution importante de l'impact.

Compte tenu de cette fatigue qui me donne envie de me mettre dans un cocon protecteur, je suis allée voir la thérapeute qui fait des massages énergétiques. Il s'est passé pas mal de choses durant cette séance. J'ai ressenti que  quelque chose était différent chez elle, j'ai mis le mot de douceur sur cette sensation et elle m'a dit avoir eu envie de me donner de la douceur. Je dois dire que lorsque cette sorte de symbiose peut se faire, sans aucun risque de fusion ou d'engloutissement c'est très satisfaisant. J'ai aussi pu me relier tant à mon analyste qu'à ma mère, car l'un et l'autre travaillaient au niveau du corpsavec leurs mains puisque René  Philibert pratiquait de la relaxation analytique et que ma mère faisait des massages. Maintenant dans la mesure où je me permets parfois de "toucher", je pense être dans une filiation. Je peux être dans une transmission, mais en faisant quelque chose de différent qui est à moi.

D'après elle, mes reins étaient vidés. Or les reins dans la bible cela renvoie à la force. Je pense effectivement avoir présumé de mes forces. Il va falloir au moins pendant un certain me "ménager".

Pour en revenir à la fatigue, je ne trop quoi en dire. je ne la ressens pas comme dépression parce que tout le reste va bien. je la ressens comme le signe d'un changement, donc je dois en tenir compte, l'apprivoiser. Je sais aussi que la fatigue peut être une alliée dans la mesure où certaines défenses peuvent s'abaisser  et permettre peut être qu'un travail "spirituel" se fasse.

Le temps de la Pentecôte est un temps un peu magique pour cela. Il est quand même curieux que j'ai vécu pendant presque une semaine avec des brûlures sur ma langue, quand on sait que des langues de feu sont entrées dans les apôtres. Peut être que j'ai appris que ce que Lytta Basset appelle "le coup de foudre" n'est pas de l'ordre du calin...  Je pense avoir eu mon coup de foudre en ce dimanche de Pentecôte. Maintenant que quelque chose est advenu, mais cela reste dans le secret de mon intime, peut être que la fatigue va se transformer en autre chose.

En 4 ans j'ai changé. On ne sort pas intact de cette maladie qui d'une certaine manière vous montre que malgré tout le travail que vous avez pu faire sur vous, il reste des tas de zones en soi qui sont puissantes et qui travaillent et peuvent aller vers la destruction. Alors peut-être que cette lassitude  peut permettre de continuer à éroder les restes de toute puissance infantile, et ... Et Dieu vit que cela était "bon". A moi de faire du bon avec ce que je vis dans mon corps. 

Prochain billet prévu: septembre 2011: rendez vous chez l'oncologue.