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mardi 20 novembre 2007

"6 mois"



La biopsie date de la mi-mai, l'intervention chirurgicale du 23 mai, le début des rayons du 16 juillet et l'hormonothérapie du 25 septembre.

Où en suis-je aujourd'hui? A dire vrai je ne sais pas trop.



Quand on est trop gourmand, on peut confondre bouche et oeil et voilà alors ce qui arrive: un oeil tout noir...

L'incident de mon oeil a été difficile à vivre. Ce qui se voit n'est pas évident à gérer. En fait quand mon sens de l'humour a pu reprendre le dessus, c'était déjà beaucoup mieux: je suis devenue "mamie panda" l'espace d'une dizaine de jours, après je me suis vue en "lapin russe", et maintenant, je redeviens presque normale, sauf que ce n'est pas terminé et que les deux yeux me semblent très dissymétriques. Je me supporte mal comme ça, mais comme tout n'est pas résorbé j'espère que mon oeil récupérera une taille normale dans les prochaines semaines. Je veux dire que quand je me regarde dans une glace je n'aime pas ce que je vois. Quand j'étais petite il y avait une vieille dame avec une paupière un peu tombante et cela me faisait très peur. Il n'y a pas eu de dégâts dans l'optique de l'oeil et je peux me consoler un peu avec ça. Mais une atteinte reste une atteinte.


Je crois que pour comprendre ce que je vis dans cette aventure avec une maladie qui vient du dedans de moi et qui peut tout à fait me détruire (même si le pronostic est un bon pronostic), il faut parfois aller voir ce que j'écris dans mon autre blog.

Un blog c'est un peu comme un miroir. Il réfléchit un jour après l'autre des états qui sont différents, il renvoie à des facettes, et en fin de compte pour moi il est très thérapeutique. L'écriture a toujours été pour moi une sorte de thérapie. Ce n'est peut-être pas pour rien que beaucoup de mes écrits professionnels sont des questions, mais ceci est une autre histoire. Le blog me permet de dire ce qui se passe en moi, aussi bien dans une recherche spirituelle que dans ce compagnonnage avec la maladie. Dissocier ces deux aspects est plus simple pour moi. Je suis scientifique de formation donc analytique. Le blog est le lieu de mes découvertes.

Mon désir profond depuis quelques années est de m'alléger, de me transformer, de muer. D'une certaine manière ce désir se réalise; pas du tout comme je pouvais l'imaginer, mais c'est bien que cela se passe ainsi.

Peut-être aurai je du "crier" plus que je ne le fais, mais j'ai connu trop de choses dans ma vie professionnelle pour ne pas être lucide sur ce que je vis et qui n'est pas dramatique. Peut-être que je me plains beaucoup des relations que j'ai avec le monde médical, mais cela est très lié au travail d'écoute que j'ai essayé de pratiquer depuis des années. Je sais que l'on est parfois tellement secoué par une phrase prononcée pourtant très gentiment par un médecin qu'on devient comme sourd à tout le reste de l'entretien.

Je sais que les abréviations (j'en emploie aussi dans mon métier) doivent être expliquées, mais que lorsqu'elles sont employées journellement, on n'y pense plus. J'ai la chance de savoir ce qu'est un Glasgow dans les comas, mais peu de personnes le savent. Pourtant comprendre ce qui se cache derrière des lettres et des chiffres est important.

Pour en revenir au titre de ce billet, oui cela fait 6 mois que beaucoup de choses ont basculé.

Pour parler de mon sein en tant que tel,d'une certaine manière, je le regarde, je le touche, mais il ne m'appartient pas vraiment. Il n'est pas mort, mais il n'est pas vivant non plus. Il reste nettement plus volumineux que le sein sain. Il y a parfois des sensations douloureuses au niveau de la cicatrice qui irradient un peu dans l'épaule. Alors bien entendu des questions naissent quand ça fait mal. Et si quelque chose se passait, et si... Mais normalement les échographies et mammographies du début décembre devraient donner des réponses. Ceci pour dire que l'angoisse liée à cette pathologie reste présente.

Aujourd'hui il reste la fatigue qui se manifeste par une sensation d'épuisement. Elle est différente d'une fatigue de dépression (je connais). Cette fatigue elle est moi, elle fait partie de moi et je vais peut-être apprendre au fil des jours à la regarder autrement. Peut-être est-elle aussi préfiguration de la vieillesse et des pertes qui l'accompagnent? Peut-être disparaîtra-t-elle?

Il est certain qu'elle augmente aussi ma compassion pour toutes les personnes qui connaissent cette sensation où l'on se sent vide, incapable de faire, même si par ailleurs les gestes restent quand même possibles. Oui je peux faire ce que j'ai à faire dans ma maison et parfois ce faire est joie, mais parfois il est effort, effort qui coûte et qui ne procure pas de plaisir.

Il reste (ou il restait) les bouffées de chaleur liées au tamoxyfène. Ma gynécologue que j'ai rencontrée jeudi m'a donné un médicament (non remboursé) qui répond au doux nom de SERELYS. Je le prends depuis moins d'une semaine et hier soir, pour la première fois depuis deux mois, j'ai passé une soirée quasiment normale. Là c'est un très beau cadeau. Ma gynécologue m'a demandé de la tenir au courant de l'effet de ce médicament, ce que j'ai apprécié, car le prochain rendez vous est dans un an, ce qui veut dire que je peux téléphoner pour donner ainsi de mes nouvelles. Quand je parle d'humanité chez les soignants, c'est à cela que je fais référence.

A chaque jour suffit sa peine. J'espère que les personnes qui me lisent et qui sont parfois choquées par un certain exhibitionnisme, comprendront mieux le travail qui se fait en moi en ce moment est un cheminent vers un "autrement". Ce cheminement que j'ai la chance de ne pas faire seule, même si ce travail de fond reste quand même très individuel.

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