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jeudi 29 novembre 2007

Anémie et fatigue.





Petit préambule.

début du préambule

Quand je suis rentrée dans le secondaire, le trimestre de rentrée n'a pas été un très bon trimestre, et pourtant je travaillais de manière très consciencieuse. Mon père à cette époque là, était directeur d'usine. Il avait instauré une bonne médecine du travail dans son usine où il y avait pas mal de solvants. Il avait pris l'habitude de travailler avec l'institut médico légal, pour les examens de laboratoire.

Ne comprenant pas à quoi était due cette baisse de rendement (scolaire), il m'a envoyé faire une prise de sang dans cet établissement que je ne savais pas être la morgue.

La prise de sang a montré qu'il y avait une anémie. Le remède à l'époque était des piqûres de vitamine B12, ce dont je garde un très mauvais souvenir. Cela sentait mauvais et le liquide huileux rendait l'injection (que je me suis très vite fait toute seule) douloureuse.Et puis c'était la grosse seringue en verre qu'il fallait faire stériliser, bref pas drôle.

Après tout était rentré dans l'ordre et "la machine à ronger le granit de la science de ses jeunes dents"que j'étais censée être, fonctionnait à nouveau parfaitement.On avait trouvé la cause du dysfonctionnement, on avait trouvé la parade, donc tout était pour le mieux.

Bien entendu quand on a 11 ans, on ne se plaint pas d'être fatigué. Mais il s'est fait dans ma tête une association entre anémie et fatigue et quand mon taux d'hémoglobine est en dessous de 12 en général je ne vais pas très bien.

Fin du préambule.


Je fais partie des personnes ayant une formule sanguine normale mais limite inférieure du moins pour les hématies et l'hémoglobine. En général cela tourne autour de 4.200.000 et 13.5.

J'ai eu un certain nombre d'analyse de sang depuis l'intervention chirurgicale du mois de mai.

Le cancérologue qui me suit m'a demandé de faire un bilan sanguin avant de le revoir, la consultation étant prévue le 10 décembre.

J'ai eu les résultats avant-hier et je n'en suis pas ravie. Tous les marqueurs sont bons donc de ce côté là, parfait. Par contre en ce qui concerne la numération globulaire, force m'est de constater que entre la fin des rayons et maintenant, il y a un petite chute des globules rouges (de 3.990.000 à 3.750.000) et de l'hémoglobine (de 12.3 à 11.7). Les plaquettes ont baissé: elles étaient à 250.000 avant la radiothérapie, 175.000 à la fin du traitement et 160.000 maintenant. Je me demande si une partie des problèmes de cicatrisation que j'ai avec mon oeil ne sont pas liés à cette baisse des plaquettes..

En soi, ces chiffres ne sont pas du tout catastrophiques. Je pense qu'ils peuvent peut-être expliquer en partie la persistance de la fatigue, alors que les rayons sont terminés depuis 3 mois.

J'espère que mon oncologue pourra me donner une raison à cette baisse. Bien évidemment je l'attribue aux rayons, car j'avais lu qu'il fallait faire des NFS de manière régulière pendant et après les séances, ce qui laissait à supposer que les rayons ont une incidence sur la formule sanguine. Mais je n'ai rien trouvé de significatif sur le net pour le moment.

Mais pour dire ce qui est, ces résultats, ont provoqué chez moi un profond mécontentement.

Je ne suis pas contente.

Je sais que cela peut paraître stupide, mais je ne suis pas contente parce que je veille à mon alimentation et à ma santé. Constater que les chiffres descendent alors que j'espérais qu'ils auraient remonté pour se rapprocher de ce qui est mon équilibre n'est pas pour moi source d'inquiétude, mais source de colère, colère contre ces rayons qui continuent à détruire.

Je n'aime déjà pas beaucoup ce que les rayons ont fait sur la structure de mon sein, mais là comme on dit, ça en rajoute une couche... Et après on viendra me dire que la fatigue c'est dans la tête.

Comme je crois l'avoir dit, je suis incapable de parler de mon cancer au passé et de dire "j'ai eu un cancer du sein". Chaque jour je vis avec ce cancer qui renvoie à ma mort. J'apprends à vivre avec lui, ce qui est certainement une très bonne chose pour moi et mon cheminement.

Peut-être que cette numération en soit relativement banale et pas dramatique, m'oblige à admettre qu'il faut laisser du temps au temps, et que les rayons comme toute médication efficace ont des effets secondaires qui ne lâchent pas prise si facilement.

Je vais être un stroumpf grognon aujourd'hui:


j'aime pas les rayons,
j'aime pas la fatigue,
j'aime pas le cancer,
j'aime pas pas être contente,
j'aime pas être en colère

J'aime pas le "ferrograd", mais faut ce qu'il faut non?

j'aime pas être un stroumpf grognon, c'est pour cela que j'en ai choisi un autre...

mardi 20 novembre 2007

"6 mois"



La biopsie date de la mi-mai, l'intervention chirurgicale du 23 mai, le début des rayons du 16 juillet et l'hormonothérapie du 25 septembre.

Où en suis-je aujourd'hui? A dire vrai je ne sais pas trop.



Quand on est trop gourmand, on peut confondre bouche et oeil et voilà alors ce qui arrive: un oeil tout noir...

L'incident de mon oeil a été difficile à vivre. Ce qui se voit n'est pas évident à gérer. En fait quand mon sens de l'humour a pu reprendre le dessus, c'était déjà beaucoup mieux: je suis devenue "mamie panda" l'espace d'une dizaine de jours, après je me suis vue en "lapin russe", et maintenant, je redeviens presque normale, sauf que ce n'est pas terminé et que les deux yeux me semblent très dissymétriques. Je me supporte mal comme ça, mais comme tout n'est pas résorbé j'espère que mon oeil récupérera une taille normale dans les prochaines semaines. Je veux dire que quand je me regarde dans une glace je n'aime pas ce que je vois. Quand j'étais petite il y avait une vieille dame avec une paupière un peu tombante et cela me faisait très peur. Il n'y a pas eu de dégâts dans l'optique de l'oeil et je peux me consoler un peu avec ça. Mais une atteinte reste une atteinte.


Je crois que pour comprendre ce que je vis dans cette aventure avec une maladie qui vient du dedans de moi et qui peut tout à fait me détruire (même si le pronostic est un bon pronostic), il faut parfois aller voir ce que j'écris dans mon autre blog.

Un blog c'est un peu comme un miroir. Il réfléchit un jour après l'autre des états qui sont différents, il renvoie à des facettes, et en fin de compte pour moi il est très thérapeutique. L'écriture a toujours été pour moi une sorte de thérapie. Ce n'est peut-être pas pour rien que beaucoup de mes écrits professionnels sont des questions, mais ceci est une autre histoire. Le blog me permet de dire ce qui se passe en moi, aussi bien dans une recherche spirituelle que dans ce compagnonnage avec la maladie. Dissocier ces deux aspects est plus simple pour moi. Je suis scientifique de formation donc analytique. Le blog est le lieu de mes découvertes.

Mon désir profond depuis quelques années est de m'alléger, de me transformer, de muer. D'une certaine manière ce désir se réalise; pas du tout comme je pouvais l'imaginer, mais c'est bien que cela se passe ainsi.

Peut-être aurai je du "crier" plus que je ne le fais, mais j'ai connu trop de choses dans ma vie professionnelle pour ne pas être lucide sur ce que je vis et qui n'est pas dramatique. Peut-être que je me plains beaucoup des relations que j'ai avec le monde médical, mais cela est très lié au travail d'écoute que j'ai essayé de pratiquer depuis des années. Je sais que l'on est parfois tellement secoué par une phrase prononcée pourtant très gentiment par un médecin qu'on devient comme sourd à tout le reste de l'entretien.

Je sais que les abréviations (j'en emploie aussi dans mon métier) doivent être expliquées, mais que lorsqu'elles sont employées journellement, on n'y pense plus. J'ai la chance de savoir ce qu'est un Glasgow dans les comas, mais peu de personnes le savent. Pourtant comprendre ce qui se cache derrière des lettres et des chiffres est important.

Pour en revenir au titre de ce billet, oui cela fait 6 mois que beaucoup de choses ont basculé.

Pour parler de mon sein en tant que tel,d'une certaine manière, je le regarde, je le touche, mais il ne m'appartient pas vraiment. Il n'est pas mort, mais il n'est pas vivant non plus. Il reste nettement plus volumineux que le sein sain. Il y a parfois des sensations douloureuses au niveau de la cicatrice qui irradient un peu dans l'épaule. Alors bien entendu des questions naissent quand ça fait mal. Et si quelque chose se passait, et si... Mais normalement les échographies et mammographies du début décembre devraient donner des réponses. Ceci pour dire que l'angoisse liée à cette pathologie reste présente.

Aujourd'hui il reste la fatigue qui se manifeste par une sensation d'épuisement. Elle est différente d'une fatigue de dépression (je connais). Cette fatigue elle est moi, elle fait partie de moi et je vais peut-être apprendre au fil des jours à la regarder autrement. Peut-être est-elle aussi préfiguration de la vieillesse et des pertes qui l'accompagnent? Peut-être disparaîtra-t-elle?

Il est certain qu'elle augmente aussi ma compassion pour toutes les personnes qui connaissent cette sensation où l'on se sent vide, incapable de faire, même si par ailleurs les gestes restent quand même possibles. Oui je peux faire ce que j'ai à faire dans ma maison et parfois ce faire est joie, mais parfois il est effort, effort qui coûte et qui ne procure pas de plaisir.

Il reste (ou il restait) les bouffées de chaleur liées au tamoxyfène. Ma gynécologue que j'ai rencontrée jeudi m'a donné un médicament (non remboursé) qui répond au doux nom de SERELYS. Je le prends depuis moins d'une semaine et hier soir, pour la première fois depuis deux mois, j'ai passé une soirée quasiment normale. Là c'est un très beau cadeau. Ma gynécologue m'a demandé de la tenir au courant de l'effet de ce médicament, ce que j'ai apprécié, car le prochain rendez vous est dans un an, ce qui veut dire que je peux téléphoner pour donner ainsi de mes nouvelles. Quand je parle d'humanité chez les soignants, c'est à cela que je fais référence.

A chaque jour suffit sa peine. J'espère que les personnes qui me lisent et qui sont parfois choquées par un certain exhibitionnisme, comprendront mieux le travail qui se fait en moi en ce moment est un cheminent vers un "autrement". Ce cheminement que j'ai la chance de ne pas faire seule, même si ce travail de fond reste quand même très individuel.

mardi 6 novembre 2007

"Une histoire d'oeil"

J'utilise un peu le blog pour sortir ma rogne...

Voici le coupable: un arbuste que j'ai soigné hier avec amour en enlevant la mousse qui était à son pied.

En fait je plantais des oignons de tulipes, le jardinier était passé le matin, le jardin était propre et il faisait très beau bref les conditions idéales pour jardiner un peu.

Et brusquement un choc dans l'oeil, comme si je m'étais empalée sur une branchette. Pas très mal, mais une sensation bizarre. Comme la vision ne semble pas altérée je continue mon travail presque jusqu'au bout.

Je rentre à la maison et voilà ce que j'ai vu:

Alors je m'affole un peu, je téléphone chez mon optalmo qui me reçoit dans l'heure qui suit.

C'est superficiel. Aucun traitement, même pour désinfecter, attendre. Les traitements homéopathiques, manifestement il ne connaît pas. Je suis donc rassurée. Je vais prendre de l'arnica, et mettre de l'hémoclar.

Alors pourquoi mettre ce billet dans le blog du cancer?

Voilà la solution.

Je prends pour lutter contre une récidive un médicament qui favorise les thromboses. Mon phlébologue après avoir injecté mardi dernier le produit pour scléroser une veine, m'a demandé de prendre de l'aspirine 2 grammes par jour pendant 5 jours. Je n'aime pas prendre de l'aspirine, parce que je sais que si je me blesse, il y a un petit risque hémorragique.

Et de fait c'est ce qui s'est passé. La rupture du capillaire a provoqué une véritable hémorragie. Alors qui est responsable de mon oeil?


mon oeil ce matin au réveil. Pas beau le n'oeil!

Bien sûr, je pourrais dire ma maladresse, mais si je n'avais pris d'aspirine, les séquelles auraient été minimes.

Alors d'une certaine manière je retombe sur le cancer qui est quand même à l'origine de cet incident.

A nouveau j'ai été confrontée à cette fatigue qui porte au coeur, et pourtant ce n'était pas très douloureux.

Alors ce matin je ressens cet incident comme si dans le match qui m'oppose à cette maladie, j'avais perdu un point.

Faut-il jardiner avec des lunettes?

jeudi 1 novembre 2007

Deux mois...



Deux mois, deux mois quoi?

Deux mois que les rayons sont terminés, un mois qu'ils n'agissent plus avec la même virulence. Deux mois, cela fait quand même 60 jours.

Un mois que je prends l'anti oestrogène et que je dois accepter ces bouffées de chaleur que je hais, même si elles sont peu nombreuses et de courte durée. Je sais que la semaine après ma naissance, par une chaleur étouffante, il y a eu l'exode et que pour se reposer ma mère me couchait dans un oreiller de plume (normal à cette époque). Et là j'ai l'impression que la chaleur qui envahit tout mon être est du même ordre que la chaleur secrétée par ce coussin dans lequel je m'enfonçais sans pouvoir rien faire, sans pouvoir me retourner, sans pouvoir y échapper..

En fait cela revient toujours à la possibilité d'être actif et là, il n'en est rien. C'est une sorte de chaleur en trop que j'aimerais parfois communiquer à ceux qui vivent dans un sentiment d'abandon de froid. Si au moins ça pouvait servir à quelque chose, à quelqu'un?

Je vais bien et je ne vais pas bien et cela c'est difficile à supporter. Je me rends compte qu'avoir de la compassion envers soi-même cela n'est pas évident du tout. Je me demande parfois si je mets un peu trop de grains dans le moulin, peut-être pas au bon rythme, ou si le moulin a un problème avec les engrenages. Et si c'est le cas, alors cela renvoie à autre chose, en particulier avec le vieillissement et cela, honnêtement, je n'aime pas.

Ce qui est certain c'est que le moulin il aime moudre, mouliner, il est fait pour ça. Il aime le bruit de l'eau dans les aubes de la roue, il aime le bruit du grain entre les meules, il aime la douceur de la farine et quand ça s'arrête, il ne comprend pas, il n'aime pas.

Chaque fois que je sens que je dois m'arrêter, que ça ne va pas, que j'ai envie de m'allonger, de fermer les yeux, d'attendre que ça passe, il y a de la révolte en moi. Je ne fais pas grand chose et ce "pas grand" est parfois du trop. Et cela je n'aime pas.

Bien entendu, je vais apprendre à vivre avec cela et puis peut-être que dans quelques mois, ce sera derrière moi. Mais aujourd'hui, avec l'automne qui est là, les feuilles qui tombent, les journées qui racourcissent, le moral est un peu en accord avec la saison.

Ce qui est certain aussi, c'est que même si mes deux seins extérieurement se ressemblent, ils restent très différents. Le sein traité a beaucoup moins de sensations, un peu comme s'il était mort et cela aussi c'est désagréable. Il n'est plus douloureux, puisque je peux me coucher sur lui, mais il a en lui une partie que je ressens comme non vivante.

Bref je vais bien et je ne vais pas très bien. Il y a quand même des petits coins de ciel bleu derrière les nuages.

Je me dis que le ciel est bleu quelque part.